Quand il découvre les premiers grands sculpteurs inuit, noyés dans la soupe mercantile que les Blancs ont appelé « l’art inuit », il a un choc qui lui ouvre les yeux sur ce qu’il n’avait jamais eu conscience de voir depuis son enfance, comme si les figures diaboliques et humaines du Moyen Âge trouvaient leur préhistoire dans les transformations chamaniques sculptées des siècles après elles. Le sculpteur réalise alors qu’une statuaire l’avait toujours entouré, celle des façades en bois sculptées des maisons médiévales dans la vieille ville traversée chaque jour pour aller à l’école, les Atlantes qui soutenaient les orgues de la cathédrale et jusque dans sa chambre, où une femme en marbre, assise au bord d’un puits, offrait une forteresse imprenable aux figurines naïves représentant des Indiens. C’est en travaillant des morceaux de bois à moitié pourris, ramassés en forêt, qu’il se serait arraché à cette mémoire de la pierre pour donner des formes à des menaces plus contemporaines de destruction, en obéissant au pourrissement du bois pour dégager ce qui pouvait encore être sauvé, « ombres du bois » enfermées dans des boites vitrées, comme des reliques.